Le soleil brillait pleinement dans le ciel bleu, laissant ses rayons venir réchauffer tous ceux qui s'étaient permis de passer un peu de temps à l'extérieur. Les rues étaient bondées, les parcs plein à craquer et que dire des terrasses sur lesquelles s'empilaient les gens, se marchant pratiquement sur les pieds. Chacun souhaitait profiter de cette belle journée au maximum, cherchant 'endroit parfait pour y passer leur temps. Et je ne faisais pas exception à la règle, profitant moi aussi des biens faits de cette magnifique journée. Assis confortablement sur l'herbe du parc, appuyé contre un arbre, je m'amusais à imaginer une vie à tous les passants qui circulaient devant moi. Je devais avouer que ce jeu était très plaisant. Seulement par l'allure ou l'habillement d'une personne, ou tout simplement par sa démarche, j'inventais tout un scénario dans ma tête, passant du lycée malheureux au gars de la mafia très dangereux. Bien entendu, je doutais fort que mon imagination reprenne réellement ce que vivait ces personnes, et c'était sûrement mieux ainsi de toute façon. Mais au moins, ça me permettait de faire passer le temps un peu plus vite. Comme on dit, chacun sa manière de passer ses temps libres comme il le souhaite.

Mon regard se porta alors sur une jeune femme d'une très grande beauté qui se permit de passer devant moi. Immédiatement, mon esprit se mit en marche, inventant les plus folles idées sur sa vie. Je l'imaginais très bien actrice ou mannequin visible sur les couvertures des magazines les plus populaires. Mais tout ça n'était qu'un masque derrière lequel elle se cachait, menant une vie beaucoup moins plaisante, se retrouvant à coucher avec les producteurs pour obtenir un grand rôle dans un film populaire. Et qui sait, peut-être même qu'elle a déjà tentée le porno pour se tailler une place de choix dans ce monde. Bon, je sais que mon imagination s'emporte parfois un peu trop, mais c'est marrant de voir à quoi peut ressembler la vie d'une personne banale.

Je fus pourtant bien vite sortie de mes pensées, lorsque je remarquais un jeune homme d'à peu près mon âge qui venait dans ma direction. Et avant même que mon imagination ne se mette en marche, je sentis mon cœur se mettre à battre beaucoup plus rapidement. Mais qu'est-ce qui me prenait à réagir ainsi en apercevant seulement une personne ? D'accord je devais avouer qu'il était très bel homme, avec une démarche des plus assuré, et un charme qui ne laissait sûrement personne indifférent, mais était-ce une raison pour que mon cœur s'affole de la sorte ? J'avais déjà bien vécu cette expérience une fois dans ma vie, mais c'était très différent. Il m'avait fallut plusieurs années avant de ressentir une sensation pareille avec mon meilleur ami. Alors comment pouvais-je d'un simple regard sentir une nouvelle fois cette douceur dans mon estomac ? Je devais sûrement avoir été victime d'un sortilège ou bien mon esprit me jouait carrément un mauvais tour. Ce genre de scénario n'existe que dans les films à l'eau de rose, jamais dans la vie d'une personne aussi banale que moi. Le coup de foudre, c'est impossible en ce qui me concerne.

Pourtant, je devais bien m'avouer que ce jeune homme m'attirait comme un aimant. Je devais découvrir qui il était, m'approcher le plus possible de lui et si même plus faire partit de sa vie. Voilà bien des idées étranges pour moi en ce moment, mais c'est tout ce qui me passait par la tête en ce moment. Je voulais absolument apprendre à le connaître. Je me levais du sol, m'arrêtant quelques instants pour réfléchir à cette idée folle qui me passait par la tête, avant de finalement me diriger vers lui, sans plus me poser de question que ça. Première chose à faire, l'aborder. Je marchais jusqu'au niveau de sa trajectoire et m'arrêtais complètement devant lui, cherchant vainement quelque chose à dire. Il devait sûrement me prendre pour un crétin, alors que j'étais planté là devant lui, n'osant même pas prononcé un mot. Faut dire que ma timidité recommençait largement à reprendre le dessus sur mes idées folles. Pourtant au bout de quelques secondes, ce qui me sembla être une éternité, j'ouvris finalement la bouche pour entamer une conversation.

- Salut. Je.. Je m'appelle Mikio.

C'était une belle journée. Oui il fallait l'admettre. Le soleil brillait déjà de bonne heure. C'est cependant à regret que je me levai. Je jetai un coup d'œil à ma gauche : personne. Ah oui! L'autre était parti il y a quelques heures. Je quittai alors ma chambre pour aller me préparer et décidai à sortir. J'avais en effet encore du temps avant d'aller travailler au club au soir. A cette idée, mon regard s'assombrit : je ne pourrai pas sortir cette nuit.. C'est pourquoi, pour me changer les idées, je voulus aller au parc.

Dès que je passai l'entrée, je remarquai immédiatement le regard insistant d'un autre jeune homme, au téléphone sur ma droite. Regard auquel je ne pus que répondre par un léger sourire plein de sous-entendus. Finalement, j'allais peut être pouvoir me divertir un peu.. Tout en continuant d'avancer, je me demandait il j'aurais l'occasion de le revoir. Puis, je me posai sur un banc, tournant le dos à l'étang. Là, j'avais une vue sur tous les promeneurs, qui passaient devant moi. Je restai là, plusieurs minutes à détailler chacun des passants. Mais inévitablement, cette activité m'agaça très rapidement. Je regardai ma montre. Le temps ne passait pas suffisamment assez vite pour moi, et l'ennui me gagnait de plus en plus. Je me leva et repris ma route. C'est là que je le vis.

Il semblait subjugué. Je me demandais pourquoi il me regardait approcher, mais une idée qui me semble plus qu'évidente me traversa l'esprit. Je continuai d'avancer et bientôt, sans que je m'y attende, il se retrouva juste devant moi, l'air plus que gêné. Que me voulait-il ? Je n'étais pas habitué à être abordé ainsi, puisqu'en général, cela se passe lors de soirée plus qu'arrosées.. Tout à coup, alors que j'allais passer mon chemin, il ouvrit la bouche et se présenta :

- Salut. Je.. Je m'appelle Mikio.

Je le regardais dans les yeux. Comment devais-je prendre ça ? D'habitude, je ne veux pas savoir leur nom, ça ne m'intéresse pas. Je devais avouer que sur le coup, j'étais déstabilisé. Mais refusant de laisser paraître une quelconque émotion, habitude que j'avais pris il y a déjà fort longtemps, j'ancrai mon regard dans le sien, tentant de le pénétrer au plus profond de lui. Puis, reprenant de l'assurance, j'articulai doucement, puisqu'il semblait attendre une réponse :

- Moi c'est Kyôhei.

Cependant, je ne dis pas un mot de plus. J'allais tester un peu ce jeune homme qui d'ailleurs n'était pas mal du tout dans son genre, peut être un peu trop timide par rapport à mes habitudes. Peut être que je pourrai m'amuser avec lui par la suite, puisqu'il semblait vouloir avoir un contact avec moi..

Bien que cela puisse paraître des plus étranges et ce n'est certes pas dans mes habitudes d'aborder quelqu'un de la sorte, cette fois, je m'étais lancé sans même songer à ce que je pourrais lui dire pour entretenir une conversation. Comme si mon corps avait parlé de lui même, préférant ne pas laisser passer une chance pareille d'aborder un garçon tel que lui. Et lorsqu'il planta son regard dans le mien et qu'il se présenta à son tour, un long frisson parcourut ma nuque, si bien que je sentis mes joues rougir honteusement. Mais qu'est-ce qui me prenait de réagir de la sorte devant lui ? Ce n'est pas comme s'il avait posé ses mains sur moi, il n'avait fait que me regarder et se présenter. Devenais-je fou au point de ne plus savoir me contrôler devant quelqu'un ? M'avait-il ensorcelé avec ce simple regard ? Peut importe les questions que je me posais, aucune n'avaient de réponse convenable à mon goût. J'étais devenu un simple d'esprit juste en posant mon regard sur lui.

Certes, je voyais bien qu'en ce moment, il attendait une réponse de ma part, que je poursuive cette conversation, mais j'avais beau me creuser la cervelle, trouver quelque chose d'intelligent à dire, tout ce qui me venait en tête c'était la même réplique. Et sans même prendre conscience de ce que je disais, j'ouvris la bouche, prononçant ainsi ces mots, me couvrant de cette façon d'une honte inimaginable.

- Tu es très mignon tu sais.

Ce n'est qu'après quelques secondes, que je réalisais finalement ce que je venais de lui dire et que je sentis mon visage se couvrir d'un feu ardent de timidité. Cette fois j'étais cuit. C'était évident qu'il allait se foutre de ma gueule et que j'allais une nouvelle fois ressentir la honte d'être rejeté. Mais je le méritais après tout. C'était à moi de veiller à ce que les mots qui sortaient de ma bouche soient beaucoup moins stupides. Pas que je veuille dire le contraire de ce que je lui avais dit, loin de là. Il était très mignon, je devais me l'avouer. Sinon, comment aurais-je pu me trouver devant lui en ce moment, cherchant un moyen de réparer ma gaffe.

- Je... Pardon... Je...

Et voilà, je recommençais à mâcher mes mots, et ce sans même savoir comment m'arrêter. Cette fichue timidité allait finir par me tuer à la longue. Je pris une légère inspiration, me concentrant de nouveau pour formuler quelque chose de beaucoup plus clair et surtout moins pathétique.

- Je suis navré, c'est juste que j'ai un peu de difficulté avec les personnes que je ne connais pas très bien. Mais ça finira par passer.

Du moins, je l'espère. Je n'ai pas très envie de passer pour un imbécile devant lui. De lui démontrer qu'il me met mal à l'aise juste en posant son regard sur moi. Je lui offris un petit sourire, espérant qu'il comprendrait ce que je voulais dire par là et qu'il ne se méprendrait pas sur mes intentions. Après tout, ma gaffe avait très bien pu mal passer à ses yeux.

- Mais faut dire que ce n'est pas vraiment pour m'aider que tu sois aussi beau gosse.

Sans même réaliser que je venais de parler à voix haut, je poursuivit ma recherche d'idée de conversation à entretenir avec lui. Si j'avais eu un seul soupçon sur ce que je venais de lui dire, sûrement que j'aurais pris mes jambes à mon cou depuis longtemps déjà.

Il se mettait à rougir. Avais-je déjà été si convaincant ? Je voyais bien qu'il tentait de parler, pour que je ne m'échappe pas sans doute. Alors j'attendais, patiemment. En fait, il ne cherchait pas spécialement ce qu'il allait dire, on aurait plutôt dit qu'il hésitait à prononcer les mots. C'est alors que je fus frappé de stupeur. Comment avait-il pu parler si franchement ? il me semble pourtant que ce n'est pas le genre de choses que l'on dit à un autre garçon. J'ouvris quelque peu la bouche, mais aucun mot ne sorti. Je devais bien avouer que j'étais pris de court en ce moment. Voyant ma surprise, il tenta de se rattraper, quelque peu maladroitement, puisque visiblement très gêné de lui-même, et se mit à bafouiller :

- Je... Pardon... Je...

Ah, voilà que sa timidité remplaçait son audace précédente. je devais me reprendre aussi. Mais avant que je ne puisse répondre quoique ce soit, il enchaîna en se justifiant. Ce qui me plut cependant, c'était la dernière phrase. Inutile de préciser que des pensées quelque peu malsaine s'emparaient de mon esprit. J'en oubliais même le garçon de tout à l'heure, que je ne reverrai probablement jamais. Lui n'avait pas l'air de s'être rendu compte de ce qu'il venait de dire. Tant mieux. Pour ne plus rester dans mon mutisme, je reprenais un peu d'assurance et répondis calmement, en lui souriant gentiment :

- Il n'y a pas de mal.

Hum. Je n'étais pas très loquace. Mais après tout, je n'étais pas non plus une personne extravagante en extérieur. Cet aspect de ma personnalité, je ne le laissais prendre le dessus que pendant le jeu. Aussi, étais-je presque aussi "timide" que lui. Mais ayant eu le courage de m'aborder, je me devais de continuer la conversation, puisqu'il était plus qu'évident que je ne voulais pas le perdre. Pour en faire quoi ? Je n'en savais encore trop rien, mais je le voulais !

Je jetai un coup d'œil à ma montre. Hum, j'avais encore du temps avant de songer à aller bosser. Me voilà bien mal à l'aise. Je ne savais plus quoi lui dire, mais je ne voulais pas le perdre. Il faut dire que je ne suis pas habitué à ce genre de situation. Ca ne se passe jamais en pleine journée, jamais dans un parc, et jamais pas une discussion !
D'habitude, ils ne demandent rien, ne me disent rien, et je ne veux rien savoir d'eux..
D'habitude, je les rencontre dans les clubs, pas en plein air..
D'habitude, quand ils viennent me trouver, je ne suis déjà plus dans mon état normal..
D'habitude, c'est plus facile..

J'aurais pu lui proposer de rester avec moi, je me doutais que ça lui ferait plaisir, mais en même temps, je ne voulais pas répondre à ses questions, ni lui en poser. J'étais complètement indifférent à tout, il n'y a que le soir où je me donne à fond, bien que ce soir, ça ne sera pas possible.. C'est alors que j'eus l'idée de l'inviter au club, mais après réflexion, il semblait trop jeune pour y avoir accès. J'avais déjà obtenu une autorisation spéciale à mon "passe partout familiale".. Non, je devais trouver autre chose.

Durant mon monologue intérieur, qui d'ailleurs n'était pas si long que je l'aurais cru, je ne remarquai pas tout de suite son regard sur moi. il était vraiment très beau. Ce serait une belle prise ! Mais j'étais totalement bloqué quant à savoir quoi dire.. Devais-je tenter de poursuivre, ou mettre fin - pour le moment - à cette conversation ? Je décidai d'attendre encore quelques secondes, pour voir s'il pouvait me sortir de ce mauvais pas, avant de trouver un moyen de m'échapper.. Demain soir j'étais libre, je pourrai jouer. je pensais déjà à l'y retrouver. Bien qu'il ne semblai pas être le genre de garçon à sortir dans ce type d'endroit, je misais sur mes atouts pour l'y convaincre..

Pourquoi ne disait-il rien ? Avais-je été un peu trop entreprenant pour lui ? Ou lui avais-je seulement coupé toute envie de discussion avec mes stupidités ? Alors que je croyais réellement qu'il avait perdu sa langue, sa voix se fit entendre, me laissant ainsi comprendre qu'il n'y avait aucun mal à ce que je sois timide. Et bien tant mieux alors, parce que bien franchement, moi je trouve ça plutôt gênant de réagir ainsi devant lui. Il est vrai qu'habituellement, je préfère rester dans mon coin en solitaire plutôt que d'affronter le regard des autres, mais depuis que j'avais eu la chance de connaître Sora et d'en faire mon meilleur ami, il m'arrivait beaucoup plus souvent de prendre les devants. Et je suis certain que s'il me voyait de là-haut aujourd'hui, il serait plutôt fier de moi en ce moment. Ça lui prouverait bien que je n'avais pas tout perdu depuis son départ. Que j'avais su garder ce qu'il m'avait si bien enseigné pendant toutes ces années.

Je laissais mon regard se balader quelques instants sur le visage de Kyôhei, gardant chaque détails en mémoire. Ça devait sûrement paraître très étrange de se faire regarder de cette façon, mais je ne pouvais m'en empêcher. Mon regard se porta alors au niveau de ses lèvres laissant ainsi surgit des pensées peu saines dans mon esprit. Mais qu'est-ce qui me prenait de vouloir tout obtenir de lui en ce moment ? Mon esprit ne pouvait s'empêcher de souhaiter toucher, embrasser et même caresser chaque parties de son corps. Comme si une pulsion, que je ne connaissais même pas encore d'ailleurs, me laissait entrevoir tout ce que je pourrais lui faire subir en retour de plaisir incontrôlable. Sûrement qu'il aurait mieux valut pour moi de le quitter maintenant, de m'éloigner le plus possible de lui, mais mes jambes refusaient de bouger, restant bien ancrées sur le sol. J'étais comme paralysé devant lui, sans pouvoir faire le moindre geste.

La seule chose qui marchait encore du moins sur moi, c'était ma voix. Elle au moins, ne semblait pas trop affectée par cette soudaine paralysie. Peut-être était-elle un peu plus chancelante et un peu moins assurée que d'habitude, mais au moins elle fonctionnait toujours.

- Ça te dirais qu'on se voit en dehors de ce parc ? Je veux dire... Dans un endroit... un peu moins achalandé.

Je savais que mon idée pouvait laisser sous entendre quelque chose de peu catholique, mais c'était un peu l'effet que je voulais donner. J'ignore pourquoi, mais être seul dans un endroit clôt avec lui me semblait tellement alléchant comme idée. Bon voilà que j'ai encore ces idées idiotes qui me traversent l'esprit. Je le connais à peine et tout ce à quoi je pense, c'est d'être allongé dans un lit avec lui. Non, mais il y avait quelque chose dans ma tête qui ne tournait certainement pas rond en ce moment.

- Un endroit où l'on pourrait être seul...tous les deux.

Mes joues s'enflammèrent immédiatement suite à mes paroles. J'aurais vraiment aimé pouvoir m'enfoncer dans le sol en ce moment, disparaître de son champ de vision, juste quelques instants, le temps de reprendre mes esprits. Alors là s'il ne comprenait pas où je voulais en venir, c'est qu'il y avait un problème avec moi. Peut-être étais-je trop direct aussi.

- Un endroit où l'on pourrait être seul...tous les deux.

Choqué. C'était le meilleur mot à employer pour me décrire. Je n'étais pas sûr d'avoir bien compris ce qu'il venait de dire, et j'aurais été jusqu'à lui demander de répéter si ses joues n'avaient pas rosies de manières si significative. Définitivement, j'avais très bien entendu ce que Mikio avait demandé. Alors c'était bien ça. En fait, il était bien comme les autres, juste plus timide. Finalement, mon choix avait été arrêté, et c'était lui qui venait de décider pour moi. Il voulait qu'on se revoit ? Très bien. A présent, je voyais déjà défiler devant moi la suite de cette aventure. J'avais vécu cela tant de fois déjà, et je me demandais bien ce que Mikio pouvait avoir dans la tête. Il semblait ne pas être du genre à s'imposer, pourtant, il avait fait à deux reprises le premier pas vers moi. Un léger sourire voulut se loger sur mes lèvres, mais je le retenais. Je ne devais pas laisser mon esprit vagabonder de la sorte, pas encore. C'est pourquoi je chassai les images qui commençaient à embrumer mon esprit et m'avançai vers lui, réduisant la distance qui nous séparait. Il était plus qu'évident que je n'allais pas refuser une offre si tentante.

Pris d'une assurance surprenante, je levai ma main droite et effleurai doucement sa joue avec le dos de mes doigts en lui souriant. Encore une fois, mon visage ne révélait pas mes pensées. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il était inexpressif, mais je me refusais à laisser transparaître mes sentiments, quels qu'ils soient. C'était une caresse aérienne, mais qui devait lui plaire. Mon sourire serein lui confirmait que je ne le rejetais pas. Je n'avais alors plus qu'à lui donner un rendez-vous. Malheureusement, ça n'allait pas être possible avant demain soir. Quelle poisse ! Tant pis, de toute façon, ce n'était pas en ruminant ma frustration que j'allais changer les choses. Ancrant à nouveau mon regard dans le sien - j'avais aimé le léger frisson qui l'avait parcouru quelques minutes plus tôt - je répondis sans hésitation :

- Sans problème. Mais je suis désolé, pour aujourd'hui, ça risque de ne pas être possible, je dois aller travailler ce soir. Que penses-tu de me retrouver demain soir, dans un club ? On pourra faire plus ample connaissance. (^.^)
Le Shion, à Shinjuku, tu connais ?

J'avais réussi à aligner plus d'une micro-phrase, et sans être mal à l'aise. Je me surprenais ! Bien évidemment, je n'allais pas me révéler immédiatement. Mais le club me semblait une idée parfaite : ainsi je serai dans mon élément, et les choses se dérouleraient comme d'habitude. Et puis, je soupçonnais le jeune homme d'utiliser sa timidité pour cacher quelque chose. Sans doute avait-il lui aussi des images plus qu'alléchantes dans la tête. J'espérais seulement pour lui qu'il ne se faisait pas trop d'idées sur moi. Il semblait gentil, s'il s'attachait à moi, je risquais de le briser. Et bizarrement, une partie en moi n'était pas vraiment d'accord. Pourquoi ? Trouvant finalement que je me posais trop de question inutiles, je me mis d'accord pour adopter la même technique que d'habitude.

Il était très évident pour moi, même si ce fut très étrange, que j'avais une réelle envie de passer du temps avec lui, d'apprendre à le connaître davantage. J'ignore pourquoi ce sentiment était si présent à moi, mais tout ce que je souhaitais, c'était de pouvoir assouvir ce plaisir en sa compagnie. Suite à ma demande un peu directe, je dois l'admettre, il se rapprocha un peu plus de moi avant de venir caresser ma joue avec sa main. Cette douce caresse me fit frissonner doucement de plaisir. J'aimais sentir ce contact sur ma peau, sentir la douceur de ses doigts sur moi. Et que dire de ce sourire qu'il m'offrait ! Bien que j'en avais vu plusieurs dans ma vie, aucun n'arrivait à égalité avec son sourire. Le plus parfait, le plus beau qu'il soit. J'en étais presque jaloux de ne pas sourire de cette façon, souffrant beaucoup trop de ma timidité.

Il prit alors la parole, s'excusant de ne pas pouvoir organiser quelque chose avant le lendemain. Pour ma part, je m'en fichais un peu. Du moment que j'avais la chance de revoir ce bel étalon, je n'allais pas jouer les capricieux pour ça. Après tout, demain viendrait bien assez vite à mon avis. Par contre, ce qui me chicottait un peu, c'était l'endroit de cette rencontre. J'accordais le fait qu'un club était sûrement la meilleure place où faire plus ample connaissance, mais ça ne serait sûrement pas pour être tranquille, juste tous les deux. Mais bon, c'est sûr que je ne peux pas non plus demander la lune dès la première rencontre. Sûrement qu'en voulant aller un peu trop vite, ce qui habituellement n'était pas mon genre, je l'avais sûrement effrayé un peu. Voilà pourquoi il souhaitait qu'on se rencontre dans un endroit plus fréquenté à mon avis.

- Ça me convient. Et bien que je ne connaisse pas vraiment cet endroit, demain sera la parfaite occasion.

Faut dire que je n'étais pas vraiment du genre à sortir dans les clubs et à faire la fêter. Mais pour cette fois, j'étais prêt à faire n'importe quoi juste pour lui. Si je devais changer mes habitudes, pourquoi pas. Après tout, ça ne pourra pas me faire de mal de connaître un nouvel endroit et de m'amuser un peu. Surtout que j'allais être en sa compagnie. Que demander de plus ! Ah oui, peut-être que ça serait bien de savoir à quelle heure je dois le rejoindre au club.

- Tu veux qu'on se rejoigne à quelle heure au club ? Personnellement, je n'ai pas vraiment d'heure précise, et comme je n'ai rien à faire non plus demain, l'heure m'importe peu. Sauf peut-être pour toi.

Après tout, il devait sûrement avoir une vie bien chargée lui. Beau comme il était, les rendez-vous devaient sûrement affluer de partout. Et dire que moi je m'y mettait aussi, lui volant sûrement quelques heures précieuses. Mais que voulez-vous, je voulais tellement être avec lui, que peu importe le prix que j'aurais à payer, je le ferais sans hésiter. Pour l'instant, je me doutais bien que j'allais devoir le quitter pour une longue journée sans pouvoir dévisager son doux visage, le laisser partir à ses occupations principales. Et bien que j'aurais préféré que le temps s'arrête pour que je puisse continuer à profiter de sa présence, il me fallait être un peu moins égoïste. J'allais le revoir demain, ça devrait être suffisant non ?

Il avait semblé un peu hésitant. Mes doutes venaient de se confirmer : ce n'était un habitué des clubs. Peu importe, je le dériderai s'il le fallait ! Il était certain que niveau intimité, ce genre d'endroit ne paressait pas être le meilleur choix. Mais s'il savait ce que la soirée lui réservait, alors peut être changerait-il de préjugé. Le Shion.. J'y allais souvent. De bonnes fréquentations en général. Un bon terrain de chasse ! J'aurais pu choisir un autre rendez-vous. Mais je n'aurais pas été à l'aise. Et puis, ça aurait ressemblé à un rendez-vous amoureux. Je ne savais pas encore réellement à quoi il pensait, mais j'espérais pour lui qu'il ne s'attendait pas à entamer une relation avec moi.. Je n'étais pas fait pour les sentiments. Tirer son coup et s'en aller. C'était ce que je recherchais.

Etrangement, ses frissons m'électrisèrent. Je ne montrai rien, il ne faudrait pas non plus qu'il se fasse des idées.. ! Je mis ça sur le compte de la satisfaction personnelle. Je le tenais.
Bon, c'est pas le tout, mais il avait raison. Après le lieu, normalement, on décide d'une heure. Voyons.. Le Shion n'ouvrait pas avant neuf heures et demi de toute façon. Je tapais donc un peu plus large, le temps de laisser l'ambiance s'approprier les lieux.

- OK. Alors, on se retrouve vers 22.30 là-bas ?

"l'heure m'importe peu. Sauf peut-être pour toi." J'aurais presque pu rire. Non vraiment, je devais admettre que je ne foutais rien de mes journées. J'attendais simplement que la nuit s'impose pour me réveiller.. Vu comme ça, j'étais complètement décalé de la vie réelle. Dingue ! Mais vraiment, c'est la nuit que tout se passe. Non en vérité, je vivais sur l'entreprise de mon père et la carrière de ma mère. Et de toute façon, la vie est trop courte, je n'allais pas me gêner pour en profiter !

Regardant ma montre, je m'aperçus que le temps avait finalement rattrapé son retard. Et si je ne voulais pas l'être, je devais penser à rentrer pour me préparer. Il fallait encore préparer la salle pour le thème de ce soir. C'est donc avec un sourire que je lui annonçai que je devais le quitter et confirmai le rendez-vous du lendemain.

Me doutant bien que les clubs devaient ouvrir quand même assez tard, je ne fus pas très surpris lorsqu'il m'annonça l'heure de notre rendez-vous. Ce n'était peut-être pas l'heure à laquelle j'étais habitué de fréquenter quelqu'un, mais ça me convenait parfaitement pour demain soir. J'allais de cette façon connaître un peu plus ce à quoi un club ressemblait. Et comme Kyôhei semble être un habitué, ça sera encore plus facile avec lui. Finalement, peut-être n'était-ce pas une si mauvaise idée de laisser mes instincts me guider à aller vers lui aussi facilement. J'allais ainsi faire connaissance avec de nouvelles habitudes qui m'était jusqu'à présent encore inconnu.

- Ça me convient parfaitement.

L'heure de la séparation arriva très vite, lorsque je le vis regarder sa montre. Sûrement que cette rencontre précipitée que je venais de lui faire prendre l'avait mit en retard. Il m'annonça alors qu'il devait partir rapidement et j'hochais la tête en souriant. Il confirma de nouveau notre rendez-vous pour demain soir avant de s'éloigner. Je le suivis du regard jusqu'à le perdre de vue avant de pousser un léger soupir. Pour une première fois dans ma vie, j'avais réussis à vaincre ma timidité assez longtemps pour m'approprier un rendez-vous avec quelqu'un comme lui. J'allais devoir inscrire cette date à mon agenda, car je savais que ça ne se reproduirait pas de sitôt.

À présent, il ne me restais plus qu'à attendre que demain arrive pour le revoir une nouvelle fois. Seulement d'ici là, j'allais devoir m'occuper l'esprit si je ne voulais pas constamment penser à ce qui allait se produire demain soir. Bien que mes pensées me laissaient suggérer plusieurs hypothèses, je préférais les ignorer et attendre de voir ce que cette soirée me réserverait. C'est beaucoup plus plaisant quand la surprise est au rendez-vous et surtout, c'est plus facile de ne pas s'attendre à quelque chose et d'être déçu que ce ne soit pas ce que l'on espérait.

Je retournais vers l'arbre où j'étais installé avant cette rencontre et repris place sur le sol. Bien que je tentais de chasser mes pensées, rien ne semblait vouloir y faire. J'allais être hanté par son visage le reste de la journée, c'était certain. Pas que c'était pour me décevoir, loin de là. Seulement, j'aurais aimé ne pas devoir subir cette pulsion de mon cœur toute la journée. Je me concentrais de nouveau sur la première occupation que j'avais eu en début de journée avant cette rencontre, tâchant d'oublier quelques instants son doux visage.